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Dans la ville d’or et d’argent, Kenizé Mourad

Kenizé Mourad, fille d’une princesse turque et d’un rajah indien, a été reporter avant de se tourner vers le roman. Dans la ville d’or et d’argent est le fruit d’un travail minutieux de recherche. De l’histoire indienne, le lecteur contemporain connaît souvent le personnage de Gandhi, et l’indépendance après des siècles de domination européenne en 1947. Kenizé Mourad a décidé de se pencher sur un personnage plus méconnu, celui d’Hazrat Mahal qui fut la première a osé se battre pour la fin de la domination britannique en Inde.

1856 : La Compagnie anglaise des Indes orientales est presque surpuissante. A l’heure du règne de la reine Victoria, l’Inde est un des plus beaux joyaux de la couronne britannique. 1856 fut pourtant une année mouvementée pour la colonie anglaise. Lorsque la Compagnie tente d’annexer le royaume d’Awadh, elle va rencontrer une résistance à laquelle personne ne s’attendait. La population se soulève, avec à sa tête la quatrième épouse du roi, Hazrat Mahal. A vingt-cinq ans, la jeune femme est prête à tout pour que son fils puisse accéder au trône, et pour préserver Lucknow, la ville d’or et d’argent.

Roman minutieusement documenté, Dans la ville d’or et d’argent est plus un récit politique et historique qu’un roman. Grâce à sa précision, ce livre s’apparente à une chronique historique d’un des évènements les plus importants de l’histoire de l’indépendance indienne. Car cette révolte de 1856 fut la première étape vers la constitution de la république indienne. Kenizé Mourad montre les évolutions des mentalités dans une société qui fut longtemps immuable. Très hiérarchisée, la société indienne était alors féodale et régie par un système de castes très strict. Par ailleurs, le pays souffrait constamment des divisions entre Hindous et Musulmans. Pourtant, face à l’envahisseur anglais, tous vont s’unir. 1856 fut plus qu’une révolte, ce fut une véritable guerre civile, où les paysans n’hésitèrent pas à prendre les armes. Kenizé Mourad dévoile toute l’horreur de cette guerre où ni Anglais ni Indiens n’avaient de limites : sans foi ni loi, les uns et les autres déciment les innocents, torturent les traîtres, massacrent le camp adverse. Difficile cependant de ne pas prendre parti pour Hazrat Mahal, héroïne passionnée, épouse dévouée, mère courage, amante passionnée. Aimée du roi pendant quelques temps, Hazrat Mahal aurait pu n’être que la quatrième épouse, une des ombres du zénana, le harem du roi. Pourtant, quand le sort s’acharne sur le roi, elle n’hésite pas à monter sur le devant de la scène, à s’investir, à devenir un symbole. Prête à tous les sacrifices, cette femme forte aime profondément son pays et serait le souffle de cette toute première guerre nationale.

Dans la ville d’or et d’argent nous montre le faste des palais des rois Indiens, et la diversité d’un peuple, au sein de la ville de Lucknow. Minarets, demeures somptueuses et temples hindous forment un paysage contrasté, qui a fait la renommée de Lucknow, qui resplendit tant le luxe y est grand. C’est dans cet univers qu’évolue Hazrat Mahal au début du récit. Mais Kenizé Mourad montre avec talent comment la situation bascule : elle dévoile les tensions entre une élite indienne qui courbe l’échine et des Anglais méprisants, bien décidés à « civiliser » toute une population, elle révèle la position difficile de ces rois que l’on prive de pouvoir et qui doivent pourtant rester forts aux yeux du peuple, des rois que l’on manipule et que l’on peut renverser aisément. Le mécontentement gronde au palais, mais également dans les campagnes. C’est cette colère que raconte le roman de Kenizé Mourad.

Dans la ville d’or et d’argent est un très bon roman qui allie une réalité historique à quelques notes de fiction. Il se dévore avec beaucoup d’intérêt et nous plonge dans l’histoire avec beaucoup de réalité. Il est idéal pour découvrir l’Inde ou pour mieux la connaître.

Dans la ville d’or et d’argent, Kenizé Mourad. Le livre de poche, 2012.

6 commentaires sur “Dans la ville d’or et d’argent, Kenizé Mourad

  1. Anis
    31 août 2012

    Je me suis parfois ennuyée dans tous ces récits de guerres, de meurtres et de massacres.

  2. Iluze
    19 juillet 2012

    Je l’avais repéré pendant les partenariats de LA mais j’avais résisté. Bon, là, une visite en librairie s’impose ! En plus, c’est une époque et une histoire que je connais peu.

  3. Céline72
    17 juillet 2012

    Ça a l’air bien intéressant, je prends note 😉

  4. lounima
    17 juillet 2012

    A priori, mon premier commentaire n’est pas passé…
    Bref, je disais que ce roman est en effet très intéressant pour sa dimension historique et bien documenté. Mais le côté « livre d’histoire » m’a un peu ennuyée.
    As-tu lu d’autres romans de cette auteur ? J’ai très envie de lire « De la par de la princesse morte » mais j’ai un peu peur d’avoir la même impression même si l’auteur s’inspire plus de l’histoire familiale pour ce roman.

  5. lounima
    17 juillet 2012

    Idéal pour découvrir cette période de l’Histoire de l’Inde, en effet. Ceci dit, bien que très bien documenté, c’est le côté « livre d’histoire » qui m’a le plus dérangée lors de la lecture de ce roman, la dimension romanesque est presque inexistante et cela m’a ennuyée.
    As-tu lu d’autres romans de cette auteur ? Personnellement, j’ai très envie de lire « De la part de la princesse morte » mais j’ai un peu peur d’être à nouveau déçue…

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Cette entrée a été publiée le 16 juillet 2012 par dans Romans historiques, et est taguée , .

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